La route est longue…
Mais, votre lien raccourci lati.cc (lire notre dernier édito) renvoie vers… Airtable ?
En plus, vous êtes sur Slack ? Et vos invitations calendrier viennent de Google ? Quelle incohérence !
Avant de rejoindre Latitudes, c’est un peu ce que je me disais. D’ailleurs, pour la petite histoire, ma première interaction avec Latitudes s’est déroulée… exactement comme ça. Je m’étais inscrit à la formation de la bataille de l’IA, et j’ai reçu plusieurs mails très bien automatisés pour me donner des dates de visio, des liens vers les modules de formation en ligne, etc.
Mais je repérais effectivement tout plein d’outils pas incroyables sur le plan éthique, et voilà ce que j’ai écrit à l’équipe, en février 2024 :
Bonjour, merci pour ces premiers mails d'inscription.
J'avoue que, compte tenu de l'angle Data/Tech for Good de votre démarche, je suis un peu surpris par votre impressionnante stack technique, qui impose pas mal d'outils aux arrivantes et arrivants. C'est notamment le cas de Slack que personnellement je remplace par Framateam et Mattermost depuis bien longtemps, pour des raisons éthiques.
[…]
Belle journée,
Louis
Les pieds dans le plat, donc, ce qui a posteriori m’étonne un peu de moi (je devais être remonté comme un coucou ce jour-là - ou alors je me sentais déjà en confiance avec l’équipe de Latitudes 🤩). A priori, je n’attendais pas grand-chose de cette bouteille à la mer. Mais, dès le lendemain, j’ai reçu une réponse adorable de l’équipe Latitudes, me remerciant pour mon mail, et me proposant d’échanger pour faire connaissance et discuter (entre autres) d’outils numériques en mode éthique/philosophique/politique.
Voilà, c’était début 2024. Et un an plus tard, par un concours de circonstances assez fou et aucunement prémédité, j’ai rejoint Latitudes. De fait, l’association avait déjà bien amorcé la transition sur ses outils numériques, et je voudrais profiter de cet édito pour rendre hommage au travail déjà accompli. Ces deux dernières années, une partie de l’équipe s’est mobilisée pour migrer nombre de ses outils bien ancrés dans les usages : Whalesync, Chilipepper, Make, Typeform, Zapier, Zoom, Super.so, QR Code Monkey, Hubspot, Bitly… Tous ont été remplacés par des alternatives davantage alignées sur nos valeurs. À la rentrée, et toujours dans l’idée de documenter notre migration, nous prendrons le temps de détailler les outils que nous avons choisis et les raisons de nos choix (encore un peu de patience 🫶).
Vers des outils numériques plus éthiques
Aujourd’hui, un plan de route se dessine pour 2025-2026, avec un départ progressif de nos outils les plus « coriaces » : Google, Slack, Notion, Airtable, etc. La route est longue, me direz-vous. Il faut bien comprendre que Latitudes, c’est une « petite » équipe (une quinzaine de personnes salariées) mais une grosse machinerie, permettant d’animer une communauté de plusieurs milliers de bénévoles, avec des interactions complexes, très fines et assez différentes selon nos programmes (animations d’atelier, inscriptions à des formations, à des cafés des anims, etc.). Ce n’est donc pas anodin de changer un outil comme Airtable, Slack ou Notion lorsque tant d’opérations sont gérées au travers de ces outils, de leurs API ou de leurs automatisations. C’est d’ailleurs tout le principe d’un enfermement technique par défaut d’interopérabilité, si chère à Cory Doctorow (lire son livre désormais traduit chez C&F Éditions : Le rapt d'Internet). Cory Doctorow que l’on a déjà mentionné dans un précédent édito de Latitudes, au passage. Coïncidence ? Je ne pense pas.
L’autre dimension qui rend les transitions vers des logiciels et services plus éthiques trop longues, c’est (hélas) que personne ne nous paye pour ça. Autrement dit, nous avançons quand nous le pouvons, au milieu de toutes nos autres tâches, sur nos fonds propres. Vous savez, ce projet qui n’est jamais prioritaire, car non financé ? Alors la route est longue, effectivement. Et vue de l’extérieur de l’organisation, cela peut paraître incompréhensible. Mais croyez-moi, ce n’est pas faute d’y croire, ou d’en avoir envie.
L’envie comme moteur
Parlons d’envie justement. Ce qui m’incline à penser que nous sommes décidément mûrs pour cette migration d’outils (j’aime bien parler personnellement de transformation « alternumérique »), chez Latitudes, c’est que cette envie est partagée. Pas seulement par quelques personnes, les « libristes », ou les plus geeks. Par l’association tout entière. Très souvent, dans les organisations qui échouent dans leur migration vers des outils plus éthiques, ce qui manque, c’est une conviction partagée (en l’occurrence, que le numérique est politique et que les choix d’outils numériques le sont tout autant), et une envie commune qui en découle.
Car pour accepter de changer ses habitudes de travail, et, soyons honnêtes, de se familiariser avec de nouveaux outils parfois moins ergonomiques ou fonctionnels, il en faut, de la conviction et de l’envie partagées.
Chez Latitudes, ce premier travail de conviction et de politisation des enjeux est bien avancé. Alors, la route est peut-être encore longue, mais la voie est assurément libre. Nous vous tiendrons joyeusement informés de nos avancées !